La faune de l'espace

(titre original : The voyage of the Space Beagle)

 

Roman paru chez J'ai Lu (n°392), traduit par Jean Rosenthal.

Le voyage du Beagle de Charles Darwin lui a fait connaître de nouvelles espèces et a contribué à l'élaboration de sa théorie de l'évolution. Le Space Beagle de Van Vogt, quant à lui, confronte un équipage de scientifiques et de militaires à des espèces particulièrement exotiques qui ne font pas qu'élargir leur vision de la biologie : motivées le plus souvent par la lutte pour la survie, ces mauvaises rencontres constituent une menace volontaire ou involontaire pour l'expédition.

Ce roman a été constitué par Van Vogt en 1950 en intégrant trois anciennes nouvelles, dont la première de toutes, The Space Destroyer, publiée en 1939. Le thème de cette nouvelle (et surtout le mode de reproduction décrit dans Discord in Scarlet, autre texte devenu la troisième partie du roman) a suffisamment de ressemblance avec Alien pour que l'auteur obtienne une compensation à l'amiable lorsqu'il a voulu intenter un procès à la sortie du film.

Le fil conducteur que Van Vogt a tissé entre ces quatre textes (il en a écrit un de plus lors du passage au roman, celui sur les Riims, qui n'est pas le meilleur), c'est un "nexialiste", Elliott Grosvenor, unique représentant à bord de cette nouvelle science qui prétend constituer le trait d'union indispensable entre toutes les autres. On retrouve l'attrait de l'auteur pour les disciplines ayant une ambition scientifique globalisante, mais aussi sa curiosité pour les théories les plus diverses, puisque les références à l'histoire cyclique chère au philosophe allemand Oswald Spengler sont nombreuses. On notera que le porte-parole de ce point de vue, le chef de la section histoire Korita, est un Japonais présenté sous un jour étonnamment positif à cette période.

Cette exploration intersidérale décrite avec la candeur scientifique de l'âge d'or a aussi hérité de sa soif de découverte, de sa volonté d'élargir des horizons de pensée, et cela sans chercher à dissimuler l'ambiguïté de l'utilisation du pouvoir du personnage principal. Faudrait-il mettre au rebut cette SF-là au motif qu'elle serait depuis longtemps passée de mode ? S'il y a encore des gens pour regarder Star Trek, il devrait a fortiori en avoir encore plus pour se plonger sans complexes dans cette "soupe originelle" bouillonnante d'idées, à laquelle on peut trouver tous les défauts, mais aussi tellement de qualités. Van Vogt le dénigré peut encore nous étonner.

 

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