Planète à gogos

(titre original : The space merchants)

 

Roman de Frederik Pohl et C.M Kornbluth publié dans la collection Présence du Futur (n°134), traduit par Jean Rosenthal.

Mitchell Courtenay est un publiciste talentueux. Il n'a pas son pareil pour créer des dépendances chez le consommateur et il est parfaitement adapté à ce monde où les membres du Congrès ne représentent plus des électeurs mais des entreprises et où la justice est fondée sur ce dicton : "Mieux vaut faire souffrir injustement mille innocents que de laisser échapper un seul coupable". Seules ombres au tableau : en ce qui le concerne, sa femme peine à reconnaître ses indéniables qualités ; en ce qui concerne l'humanité, elle se sent à l'étroit sur la Terre surpeuplée. Mitchell Courtenay connaît le remède, lui qui obtient la direction du projet Vénus. Cette planète est inhabitable ? Peu importe ! L'important, c'est de persuader les gens qu'ils ont envie d'y habiter.

Mais tout semble se désagréger pour Courtenay : d'abord, l'agence rivale Taunton essaie de l'éliminer (ce qui, sans déclaration de guerre privée préalable, constitue un "crime commercial"). Ensuite, il est assommé, puis son tatouage d'identification est maquillé, et le voilà embarqué sous un faux nom vers les plantations Chlorella du Costa Rica où il découvre la vie pénible de consommateur. Il y est remarqué par Gus, qui prend le risque de lui avouer qu'il est membre de l'Association Mondiale Écologiste, que Courtenay décide d'infiltrer de l'intérieur pour l'empêcher de nuire. Mais, confronté à la vie normale, il commence à prendre conscience de certaines réalités.

Dire que ce livre a été écrit en 1952 ! Il reste terriblement (trop ?) actuel. On pourrait presque lui faire le reproche d'avoir servi de sources d'inspiration aux publicitaires. Quand Pohl et Kornbluth suggèrent qu'une entreprise paye une cantine scolaire pour qu'elle emballe les aliments préférés des enfants dans des emballages aux couleurs de sa marque et les autres aux couleurs de son concurrent, ils anticipent et même sous-estiment l'intrusion des entreprises américaines dans le système scolaire. Un livre tout simplement visionnaire et génial, traitant avec un ton humoristique des dérives dramatiques.

 

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