Le monde du non-A

(titre original : The World of null-A)

 

Roman paru chez J'ai Lu, traduit par Boris Vian.

Premier volume de la trilogie du non-A (dont le troisième tome a été écrit bien plus tard dans les années quatre-vingt), le monde du non-A est devenu un objet de culte en France, peut-être en partie à cause de l'identité de son traducteur, Boris Vian, auteur lui-même très en vogue à cette époque.

Arrivé dans la ville de la Machine pour prendre part aux jeux, qui devront déterminer ses capacités de réflexion non-aristotéliciennes et définir sa place dans la société non-A, Gilbert Gosseyn découvre peu à peu que son identité est truquée, que ses souvenirs sont impossibles, et que tout ce qu'il croyait savoir de lui-même est sujet à caution. Sa singularité en fait un homme recherché, et c'est en tentant de s'enfuir qu'il est tué... et qu'il ressuscite, sur Vénus, la planète-modèle de la philosophie non-A, menacée par un complot galactique.

Ce roman laisse un arrière-goût de déception qui tient au style de Van Vogt. Il ne prend pas le temps de développer ses personnages, ce qui annihile toute forme d'intrigue "policière" en ne laissant pas au lecteur le soin de réfléchir au rôle des uns et des autres dans l'énigme. De plus, la crise d'identité(s) du personnage principal n'est qu'un simple ressort de l'intrigue, balayée par l'action. On reste donc un peu sur notre faim car on ne peut pas s'empêcher à l'usage qu'un Dick pourrait faire des potentialités de ce roman.

Car ces potentialités sont exceptionnelles, avec une intéressante illustration des théories de Korzybski, utilisées pour construire un modèle socio-philosophique, immédiatement mis en danger et testé dans un contexte universel hostile, qui l'oblige à entrer en résistance. En prenant un héros non-A, le roman permet d'imaginer une application au quotidien d'une vision non-aristotélicienne du monde, refusant les hypothèses simplificatrices. Cette remise en question permanente est particulièment adaptée aux histoires que nous conte Van Vogt, à leur complexité même effleurée et à leur perpétuel mouvement.

 

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