Stalker

(titre original : Piknik na obotchine)

 

Roman paru dans la collection Présence du Futur (n°314), traduit par Svetlana Delmotte.

Ils sont repartis aussi soudainement qu'ils sont venus. Ils, ce sont des extraterrestres, sans doute. Ils ont occupé plusieurs Zones sur la Terre, et ont laissé derrière eux des objets, à la fois dangers mortels et merveilleuses découvertes technologiques. Pour mettre la main sur le trésor, il y a les expéditions officielles, et il y a le réseau parallèle, celui des "stalkers", aventuriers prêts à risquer leur vie parce qu'ils ont besoin d'argent, mais aussi à cause de l'attrait d'un mythe qui prétend qu'une boule d'or de la Zone exaucera tous les souhaits de celui qui le trouvera.

La sensibilité d'Arkadi et Boris Strougatski tisse ce roman sur l'espoir et la peur, la vie et la mort, des stalkers, ces hommes qui côtoient l'inconnu, source de savoir mais surtout de danger. Ces destinées renvoient aux insuffisances de l'homme, à sa volonté de connaître qui se heurte à sa précipitation, son manque d'humilité, sa méconnaissance. Le poids de ces vies est rendu encore plus lourd par le dialogue avec "Valentin le prix Nobel", qui constitue le cœur du roman, et où cette quête éperdue est expliquée, non pas sur ce que l'on sait, mais sur ce que l'on ne sait pas.

Comme Lem dans Solaris avant eux, les frères Strougatski explorent le thème du contact extraterrestre avec une subtilité, un recul, qui semble être une patte de ces rares mais précieuses œuvres de la science-fiction d'Europe de l'est, bien loin des clichés de leurs collègues nord-américains. "Tout ce que j'ai lu sur le sujet semble être un cercle vicieux. S'ils sont capables d'entrer en contact, c'est qu'ils sont intelligents. Et à l'inverse : s'ils sont intelligents, ils sont capables d'entrer en contact. Ou, tout simplement : si un être extra-terrestre a l'honneur d'avoir la même psychologie que l'être humain, il est intelligent". Les Strougatski proposent un autre modèle, celui du "pique-nique au bord du chemin", qu'ils illustrent avec la grandeur de leur modestie. Il ne sera désespérant que pour celui qui croit en l'infaillibilité de l'homme, mais il confortera celui qui croit que découvrir et comprendre constituent une démarche perpétuelle.

Stalker a été adapté au cinéma par Andreï Tarkovski dans ce qui est souvent considéré comme son meilleur film. Que ceux qui considèrent que les fims de Tarkovski sont ennuyeux et abscons se rassurent : on pet être insensible à son cinéma et apprécier le roman qui a bien peu de choses en commun.

 

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