Sur l'onde de choc

(titre original : The Shockwave Rider)

 

Roman de John Brunner, écrit en 1975 et paru au Livre de Poche.

Ce roman est peut-être le plus visionnaire de John Brunner : il y invente le virus informatique, ainsi que des possibilités logicielles nouvelles pour son époque. Pourtant, l'intérêt du roman se situe en grande partie ailleurs.

Par exemple dans ce jeu de mots : "First, the foot race (la course à pied); then, the arm race (littéralement, la course aux bras, en fait, la course à l'armement); then, the brain race (la course aux cerveaux), and, finally, the human race (la course aux hommes, ou la race humaine)". On peut en effet s'en servir pour résumer une partie de l'œuvre de Brunner: L'orbite déchiquetée décrit la course aux armes, Sur l'onde de choc la course aux cerveaux et Tous à Zanzibar la course aux hommes. C'est évidemment un découpage un peu caricatural tant chaque œuvre aborde de nombreux thèmes.

Le héros est un génie, détecté très tôt par les services de l'Etat américain qui lui donnent une éducation spéciale et très coûteuse dans un centre spécialisé. Mais, révolté par la vue d'une créature produite par les manipulations génétiques d'un des directeurs du centre, il se rend compte des défaillances du système et s'enfuit. L'Etat n'a pas l'intention de se séparer d'un élément aussi prometteur et le traque.

Mais il fait partie des codes 4GH, c'est-à-dire qu'il a les moyens de changer sans cesse d'identité sur le réseau qui contrôle la vie de ses concitoyens : celui-ci est en effet le seul point d'ancrage des gens, entraînés dans le style-de-vie banane, qui les incite à perdre toute attache, à sans cesse changer de domicile, d'emploi, etc, dans une frénésie de consommation, selon la devise "Rebondir ou s'écraser". Mais dans ce monde devenu paranoïaque où la denrée la plus chère est l'information et où chacun a peur que son voisin en sache plus que lui (la plupart des informations transitant par le réseau sont codées), où trouver de la raison ? Peut-être dans ces zones de compensation légale, villages sans téléphone ni accès au réseau bâtis sur les ruines de la Californie : celle-ci a été dévasté par un énième tremblement de terre, et l'Etat n'a plus les moyens de reconstruire.

Ce n'est qu'un bref aperçu de ce roman bien plus court qu'un Tous à Zanzibar, mais qui n'est pas loin d'être aussi riche. Ce roman est parfois considéré comme un précurseur du cyberpunk, mais Brunner ne reconnaît pas la filiation. Il est vrai qu'à mon sens, les romans parfois étiquetés "pré-cyberpunk" sont bien meilleurs que les cyberpunks purs et durs, car ils possèdent le souffle spéculatif sans s'être enfermés dans le carcan d'un genre qui finit par se mordre la queue et par manquer d'oxygène à force de décrire les mêmes types de société et de surexploiter les mêmes thèmes.

 

Retour à la page John Brunner